La chasse aux VÉ est commencée

Jeudi le 27 juillet 2017, Gilbert Lavoie chroniqueur pour le journal Le Soleil publiait une chronique intitulée « Le procès de l’auto électrique » traitant d’une étude récente de l’institut économique de Montréal (IEDM). (cliquez ici pour lire la chronique)

Une réponse du président de IEDM Michel Kelly-Gagnon en réaction à la chronique ci-haut fut publiée à la section point de vue du journal Le Soleil du 30 juillet et intitulée : « Voitures électriques : quand le chroniqueur prend le fossé » (cliquez ici pour lire le point de vue)

N’ayant pu résister à répondre à autant de demi-vérités et de critiques sans solutions, je vous fait part de la réponse en trois sections que j’ai adressée dimanche au journal Le Soleil.

1. Concernant la pollution attribuable à l’auto électrique,

Selon les résultats d’analyse du docteur en physique et auteur du livre « Rouler sans pétrole » Pierre Langlois (cliquez ici pour consulter les détails de son analyse), ce dernier démontre effectivement que la fabrication d’une voiture électrique est plus énergivore que celle d’une voiture à essence en raison de l’énergie requise pour la fabrication de la batterie.  Dans le contexte actuel où un grand nombre d’usines n’utilisent pas toujours une source d’énergie « propre » pour fabriquer leurs voitures, il est vrai d’affirmer que la fabrication actuelle des voitures électriques est souvent plus polluante que celle d’une voiture à essence.

Voici un graphique de M. Langlois démontrant la production de CO2 alors qu’un VÉ est construit et alimenté à partir d’énergies moins propres.

Guerre graph1.jpg

Toutefois, quand on tient compte de l’ensemble du cycle de vie d’une voiture, il devient très clair que la voiture électrique est moins polluante.  L’utilisation des hydrocarbures ne sera jamais aussi propre que l’utilisation de l’électricité propre.  Donc à long terme, même si la fabrication d’une voiture électrique est plus polluante, dès qu’elle commence à rouler, elle pollue beaucoup moins qu’une voiture à essence.  Nous avons donc tout à gagner à nous convertir aux voitures électriques et favoriser la production d’électricité propre.  A ce niveau, avec un peu plus de volonté, le Québec pourrait devenir un véritable leader mondial et même se positionner avantageusement sur le plan économique.

Voici un autre graphique de M. Langlois démontrant la production de CO2 alors qu’un VÉ est construit et alimenté à partir d’énergies renouvelables tout en donnant une seconde vie aux batteries.

Guerre graph2

La Cie Tesla a déjà annoncé son intention de produire ses voitures à partir d’énergie propre telle que le recouvrement complet de son usine avec des panneaux solaires.  Les compagnies automobiles allemandes ont déjà affirmé leur volonté d’aller dans une direction semblable.  Des parcs éoliens et solaires font maintenant leurs apparitions aux États-Unis, ce qui veut dire que dans un futur proche, la fabrication et l’utilisation d’une voiture électrique seront encore moins polluantes.

L’usine Tesla au Nevada É.-U. une fois complétée et recouverte de panneaux solaires (connue sous l’appellation de Gigafactory)

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Une photo récente de la Gigafactory en construction (source electrek.co)

Guerre usine recente

Pour de plus amples information sur l’usine cliquez ici.

2. Concernant le faible rendement des subventions pour les voitures électriques,

L’IEDM affirme que les subventions pour les voitures électriques sont peu efficaces et coûteront une fortune aux contribuables, il serait grand temps de réaliser que ce sont plutôt les mauvais choix que font les contribuables et l’industrie qui finissent par coûter cher.  Plus nous attendons, plus cela deviendra dispendieux, puisque notre économie est largement construite sur des façons de faire polluantes qui ne sont plus viables pour la survie de notre planète.  Conserver le statu quo c’est se diriger vers un suicide environnemental et économique.

Mais quelle est la solution de l’IEDM, de l’industrie pétrolière et automobile pour résoudre le problème?

Dans son article M. Kelly-Gagnon (PDG de l’IEDM) affirme que cela ne changerait à peu près rien s’il y avait un million de voitures électriques sur nos routes… Sérieusement? Un enfant de 10 ans serait capable de voir dans ce cas que nous consommerions moins de carburant donc moins de pollution (des GES?) et une meilleure santé pour tous, sans compter que nous produisons l’électricité chez nous.  De plus, d’un point de vue économique, le Québec a tout à gagner avec l’électrification des transports.

M. Kelly-Gagnon pense également que sans l’intervention des gouvernements, l’avènement des voitures électriques se fera toute seule?  Pourtant les pays qui ont retiré leur subvention ont vu leurs ventes de véhicules électriques diminuer considérablement.  Les états qui ont imposé une loi zéro-émission reçoivent de la part des constructeurs une offre de véhicules électriques plus grande que les autres.  Pour vérifier ceci, essayez simplement de trouver présentement des véhicules électriques dans les cours de concessionnaires.  Les pays qui ont mis en place de très importantes pénalités économiques à l’achat de véhicules polluants obtiennent une augmentation significative du nombre ventes de véhicules électriques, alors qu’ils utilisent l’argent recueilli pour financer l’achat de véhicule moins polluant.  Alors comment expliquer tout cela sans l’intervention des gouvernements?

Voyez-vous une voiture électrique dans cette cour GM?  Ne cherchez pas, il n’y en a pas!

Pour obtenir des changements il faut commencer à quelque part et c’est précisément ce que fait notre gouvernement avec ses subventions et sa volonté pour un loi zéro-émission afin de permettre l’émergence de la voiture électrique de manière à créer une masse critique pour favoriser la baisse de prix.  Cela fait partie d’un cocktail de solutions pour résoudre nos problèmes environnementaux.  Quelle serait la solution de l’IEDM pour remplacer le parc automobile actuel par des véhicules moins polluants?

Un peu plus de chance chez Nissan, il y avait une seule Leaf devant le concessionnaire (pas sur cette photo)

Pour ce qui est de la prétention de M. Kelly-Gagnon au niveau du gaspillage de fonds publics en subventions inefficaces, il est réaliste de se poser la question à savoir si c’est la meilleure façon de faire aujourd’hui.  Lorsqu’on regarde en Europe et en Asie, les pays qui ont mis en place des politiques plus agressives pour favoriser une transition obtiennent de meilleurs résultats.

Toutefois, nos gouvernements disposent-ils de toute la latitude nécessaire et l’appui suffisant de la population afin de mettre en place des mesures plus musclées et ce tout en faisant face aux différents lobbys qui ne cherchent qu’à maintenir leur emprise?  Des mesures pour transformer notre économie basée sur les énergies fossiles et la consommation à outrance, à une économie bâtie sur des énergies propres, viable et durable.  Pourtant ce n’est même pas une question de choix, c’est une question de survie.

Comme peuple, avons-nous la volonté de faire des choix intelligents pour notre avenir où ne pouvons-nous voir que notre portefeuille immédiat sans penser aux conséquences pour demain?

Alors M. Kelly-Gagnon, à quoi sert l’IEDM?  Favoriser le changement et bâtir l’économie de demain, une économie viable et durable?  Où simplement désinformer les gens pour maintenir les acquis actuels d’une économie non viable?

Surprise, chez BMW il y avait deux i3 dans cette cour (elles sont visibles)

3. Concernant le procès de l’auto électrique,

Alors que la voiture électrique commence à prendre de plus en plus de place et menace certains secteurs de l’industrie qui refuse d’évoluer, il devient très évident et nécessaire d’être conscient qu’une guerre de désinformation commence à se jouer pour salir la voiture électrique et maintenir les acquis actuels de l’industrie.

Pensons simplement aux pétrolières, aux fabricants de moteurs à essence, de réservoirs d’essence, de silencieux, de filtres à essence, de pompe à essences et j’en passe qui seront prêt à faire n’importe quoi pour maintenir leurs acquis.

Pourtant une nouvelle économie se pointe à l’horizon, celle du transport électrique, des panneaux solaires, des moteurs électriques, des systèmes électroniques, des solutions de recharges et de services à tous ces nouveaux besoins.  La société évolue et se transforme, les constructeurs les plus sages seront ceux qui prendront le virage pour préserver et créer de nouveaux emplois tandis que ceux qui s’acharnent à maintenir le statu quo seront voués à disparaître.

Pour ma part j’ai choisi mon camp et vous?

6 Commentaires

  • De très bons points!

    À souligner aussi que la Note économique de l’IEDM cite deux références concernant le fait qu’une auto électrique produit plus de GES pour sa production… en « omettant » de préciser que sur le fond ces deux études concluent que sur un cycle de vie complet, les VÉ, même ceux avec les plus grosses batteries comme les Tesla, réduisent d’au moins 50% l’émission de GES que leur équivalent à combustion.

    Toutefois, et c’est là que la Note est un peu bizarre, l’IEDM reconnaît au paragraphe suivant que sur un cycle de vie complet les autos électriques vont émettre largement moins de GES. Ils affirment même que, particulièrement au Québec (hydroélectricité), cela pourrait aller jusqu’à 80% moins de GES (il faut calculer le %, ils ne le donnent pas…)! Par contre, plutôt que de se baser sur les deux études précédentes, ils font référence à une autre Note de l’IEDM et, lorsque l’on fouille dans cette dernière, on ne retrouve pas les chiffres qu’il donnent dans la plus récente (j’ai cherché de différentes façons).

    Dans 10 ans, ces « Notes » seront vues avec humour, mais pour l’instant je suis déçu qu’elles trouvent autant d’écho dans les médias sans (bien souvent) réflexion critique. Au moins le chroniqueur du Soleil a fait valoir les lobbys qui agissent contre les VÉs, mais dans Le Devoir, l’éditorial était désespérant.

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  • Il n’est pas facile d’avoir la vérité quand notre idéologie est basée juste sur le profit. Un débat que nous n’avons pas fini d’entendre. Comme la cigarette, nous savons que c’est dommageable pour la santé, mais elles sont encore sur le marché.

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  • L’automobile électrique aurait pu remplacer celle à essence dès le début du siècle, car elle était silencieuse, n’avait pas besoin d’être démarrée par une manivelle, n’émettait aucune fumée et le perfectionnement des batteries lui aurait permis un jour une meilleure autonomie. À cette époque, celle-ci comptait déjà pour plus de 30% du parc automobile alors qu’aujourd’hui, elle ne représente même pas 5%
    Vous rétorquerez que la production d’électricité par le charbon n’aurait rien changé en ce qui a trait à la pollution , je vous répondrais que par une centrale atomique utilisant la filière Thorium au lieu de l’Uranium aurait été possible, malheureusement comme il était impossible de produire des bombes atomiques avec le thorium, le choix fut facile à prendre et on se retrouve avec le péril nucléaire en plus de la pollution, quel gâchis !
    L’auto électrique pour l’industrie automobile est comme un cheval de Troie car comme elle demande beaucoup moins d’entretien qu’une à essence, elle n’est pas rentable et risque à long terme de causer du chômage.
    De plus contrairement à la vente des camions et des vus, elle coûte plus qu’elle ne rapporte!

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    • Effectivement, l’histoire aurait pu être très différente. Mais il faut se rappeler qu’au début du XXe siècle les questions environnementales étaient loin d’être dans la pensée des gens tandis que la majorité des familles n’avaient pas encore l’électricité à la maison. Entre le charbon et la voiture électrique, le problème n’est pas la voiture électrique, mais bien le charbon et cela commence à changer. Le plus grand problème des fabricants automobiles c’est la peur et la résistance au changement. Cette même problématique qu’a dû vivre le maréchal-ferrant lors de l’arrivée des voitures à essence. L’industrie doit se transformer car le modèle actuel n’est pas viable à long terme. Ceux qui sauront se réinventer profiteront de l’évolution, les autres disparaîtront. L’histoire de l’automobile en est rempli d’exemples. Pour ce qui est de la rentabilité des voitures électriques, voilà le plus grand mensonge de l’industrie. Avec le prix à la baisse des batteries, comment un véhicule nécessitant moins de pièces et moins de processus d’assemblage pourrait-il coûter plus cher à produire qu’un véhicule plus complexe. La réponse porte uniquement sur la question des coûts en recherche et développement et le volume de vente, mais puisque les fabricants sont réticents à les produire, ils créent volontairement leurs propres déficits.

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  • A reblogué ceci sur Shift2Drive.blog.

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  • Le VE ici aussi en Europe et en France, commence à être attaqué ou dénigré.
    Les vieux fantasmes éculés sur les menaces voire sur l’incapacité supposée de nos centrales nucléaires à pouvoir fournir suffisamment d’énergie en cas de pic de demande d’énergie…Quand on sait que selon une étude on a estimé à 40 millions au niveau mondial le nombre de VE en circulation à l’horizon 2040…soit un pourcentage infinitésimal du parc automobile global, on reste quelque peu circonspect sur les réels motifs de certains
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